Bazoom.ca » Underground https://bazoom.ca Tue, 08 Sep 2015 13:41:00 +0000 fr-FR hourly 1 http://wordpress.org/?v=3.9.8 Zïlon à contre-courant (2) https://bazoom.ca/culture/zilon-a-contre-courant-2 https://bazoom.ca/culture/zilon-a-contre-courant-2#comments Mon, 20 Jan 2014 15:24:41 +0000 https://bazoom.ca/?p=9497 Zïlon à contre-courant (2)
[Deuxième et dernier volet. Pour lire le premier.] L’artiste underground créait des expos dans édifices abandonnés, peignait sur des toiles non montées, dans des ruelles. En 1987, le Business, bar branché de l’époque, l’a invité  à décorer la place. Il était devenu Monsieur Zïlon, le personnage qu’il s’est inventé. « Avant Zïlon était comme Zorro, […]]]>
Zïlon à contre-courant (2)

[Deuxième et dernier volet. Pour lire le premier.]

L’artiste underground créait des expos dans édifices abandonnés, peignait sur des toiles non montées, dans des ruelles. En 1987, le Business, bar branché de l’époque, l’a invité  à décorer la place. Il était devenu Monsieur Zïlon, le personnage qu’il s’est inventé. « Avant Zïlon était comme Zorro, laissant sa marque, son Z, un peu partout mais sans que l’on sache qui se cachait derrière ce nom. La Presse a couvert l’événement, il y a eu des interviews à la télévision. Là on a commençait à me reconnaître. Avant je fittais avec le papier peint et c’était bien comme ça. »

« Les galeries d’aujourd’hui veulent exposer de jeunes artistes, souvent de l’extérieur et vendre leurs œuvres à un prix de fou. Beaucoup de galeristes n’acceptent pas ma franchise. Pourtant, je suis prêt à dialoguer, à ouvrir des débats francs. Il y a eu des galeries qui voulaient me dire comment faire et quoi faire.  Tout le monde est roi et maître dans son patelin. C’est bien si j’inspire des jeunes, mais il ne faut pas monopoliser sur le talent des autres pour faire sa propre putain de carrière. On t’inspire, bien, mais vas ailleurs. »

« Un galeriste, en mettant fin à deux ans de collaboration, m’a déjà dit qu’il ne connaissait rien à l’art urbain. On se pense bien entouré quand on reçoit un chèque. Mais ce que tu reçois, tu leur dois. C’est comme aller à l’école avec les prêts que tu dois ensuite rembourser. Regarde Serge Lemoine mort d’un cancer, dans la pauvreté. Aujourd’hui ce sont des businessmen qui ont sa succession. »

La rencontre avec France Cantin a été un point tournant des dernières années. « France m’a beaucoup aidé mais, aujourd’hui, elle commence une nouvelle carrière. Je l’ai connu au temps du F**k Star du Sky avec Costa et Frigid. Au début, elle se tenait loin de moi, à cause de ma réputation de pas facile. Au bout de quelques temps, je lui ai demandé si elle voulait être mon agent et elle a accepté. »

Zïlon continue à partir des groupes obscurs comme les Fraises Duchamp avec Simon DuPlessis et Steve Lévesque. « Mais je ne suis pas musicien, je ne suis pas capable de suivre un musicien professionnel et il n’est pas capable de me suivre. Mais la vie est un jeu, faut pas que ça devienne trop sérieux. Je me suis trouvé une fibre de producteur. Si j’avais de l’argent, j’aimerais produire des groupes fuckés –dans le bon sens du mot. J’ouvrirais une galerie avec des artistes les plus disjonctés mais avec du style.»

« La musique d’aujourd’hui est devenue de la musak. Une franchise, un Mcdonald ou je ne sais quoi. Je suis moi aussi un produit de consommation en un certain sens. Quand tu paies une toile à deux mille dollars… Tu achètes une signature en quelque sorte. Mais quand je vois des toiles se vendre cent mille dollars pour un deux pieds par deux pieds… Elle est où, l’Art Pop ? Populaire veut dire accessible. Je ne veux pas être millionnaire. Je souhaite vivre confortablement. Pouvoir continuer à avancer. Je dépends des autres, comme tout le monde. En tant qu’artiste, je dois vendre mes images, vendre mes idées. »

« J’essaie de transmettre l’esprit des années 1970 et 1980 aujourd’hui. J’ai fait des collages sur mon I-Phone. On pourrait dire que ça ressemble à du dadaïsme digital. Ce sont des améliorations technologiques. J’ai un atelier dans ma main. Mais j’ai besoin du côté physique. »

« C’est pas toujours facile se lever le matin. Le téléphone ne sonne pas souvent. Suis-je encore utile dans la société dans laquelle on vit ? La célébrité, ça dure deux minutes. Notre époque est conservatrice, consommatrice. Dans mon appartement actuel, j’ai demandé la permission de peindre les murs. On a accepté mais en partant je dois les remettre blanc. Je ne me reconnais même plus dans les magazines gais avec ces jeunes de dix-huit ans photoshoppés. »

Pour bien des artistes, 2013 aurait été une année de rêve avec la décoration du Shag du Métropolis, Givenchy à Paris et le décor du Quai 417 dans le Vieux-Montréal. Pourtant Zïlon est mitigé.

« Il y a encore des gens inspirants aujourd’hui. J’ai eu des bons moments en 2013. J’ai mes insécurités, mes questionnements. Je ne sais pas où je m’en vais. J’ai eu des perles cette année mais aussi des moments pénibles. »

«Des fois je crois que j’aurais dû mourir dans les années 1990, au sommet de mon fun. Je ne veux pas être perçu comme un pépère. Ma retraite sera six pieds sous terre. Je suis encore un punk. Je peux encore faire de la magie avec une économie de moyens, du beau, bon, pas cher. Les punks existent encore mais ils se couchent plus tôt », ajoute-t-il avec une pointe d’humour. « Je me sens écarté, nostalgique. Je ne retrouve plus nulle part l’effervescence de cette époque. »

« Faut aller jusqu’au bout, par perdre espoir. Il y des endroits pour faire des choses intéressantes mais il faut des gens intéressés. Je suis conscient de ne pas être facile à travailler mais je me considère généreux. Je suis une personne heureuse quand je travaille, quand je crée. J’aime rire, rencontrer des gens intelligents, avec du caractère. » Et des projets.

[Photos fournies par l’artiste.]

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Zïlon à contre-courant https://bazoom.ca/culture/zilon-a-contre-courant https://bazoom.ca/culture/zilon-a-contre-courant#comments Sun, 19 Jan 2014 13:50:45 +0000 https://bazoom.ca/?p=9493
En ce froid glacial de début janvier, je me rends chez Zïlon dans son appartement du dix-septième étage donnant sur le Parc Lafontaine.]]>

En ce froid glacial de début janvier, je me rends chez Zïlon dans son appartement du dix-septième étage donnant sur le Parc Lafontaine. Il a dû quitter l’an dernier son appartement qu’il habitait depuis quatorze ans car ce dernier allait être transformé en condo.

« J’ai choisi cet appartement car je devais avoir un contrat avec une galerie m’assurant un revenu de base », souligne-t-il. En ce début de 2014, aussi surprenant que cela puisse être, Zïlon n’est attaché à aucune galerie.

Né à Montréal en 1956, il a passé son enfance à Laval, à Sainte-Rose plus précisément, non loin du motel Idéal, propriété de son parrain. Il a un frère de plusieurs années plus jeune que lui. Son père était alcoolique et violent, physiquement et verbalement. Ses parents ne se sont jamais divorcés mais, des années plus tard, son père a vécu avec une maîtresse tandis que sa mère a préféré vivre seule.

 «Je me suis toujours senti comme pas voulu. Je me souviens de soirées où mon père arrivait alcoolisé au maximum aux petites heures du matin. Mon père, après avoir eu des mots très durs envers ma mère, lui disait va chercher les deux chiens en haut en parlant de ses enfants au deuxième étage.» À 57 ans ces mots lui résonnent encore dans la tête. Ils se retrouvaient en pyjama à 3 heures du matin, alors qu’ils avaient de l’école le lendemain, à le regarder ingurgiter sa Xème bière en vomissant des mots de haine. Il lui reste un sentiment d’insécurité, d’abandon, un sentiment qui lui revient à chaque fois que quelqu’un le laisse tomber sans explications ou ne respecte pas ses engagements. Son père est décédé vers 2000, il continue à communiquer avec son frère et sa mère mais leurs relations sont superficielles.

L’art est devenu très vite un refuge pour lui. Il a commencé très jeune à dessiner sur des feuilles, lui permettant de quitter ce monde et, à travers cette fenêtre, se réfugier dans une autre réalité.

La solitude est un trait de Zïlon. « On me croit toujours occupé à de grandes soirées mondaines, de grandes invitations. J’ai beaucoup de connaissances mais peu d’amis. J’ai été mal nourri au point de vue affectif. J’ai eu des chums, deux relations qui ont duré environ cinq ans mais ça aurait pu être un an et tout aurait déjà été dit. J’ai eu l’impression que certains cherchait le Zïlon sugar daddy. J’ai toujours aimé le look mauvais garçon, mais je me suis retrouvé quelques fois avec des mauvais mauvais garçons.»

L’art devient un havre, une thérapie. « Ça m’a permis de passer à travers de très mauvais moments. Ma créativité, je m’en sers même si c’est juste pour moi. » Comme dans des périodes comme aujourd’hui où il n’a pas de projets en vue.

« J’ai des idées pour les fins et les fous. Je carbure aux projets. Mais dans des moments comme aujourd’hui où je parle à des sourds qui ne veulent rien entendre ou que je montre à des aveugles qui ne veulent rien voir… trop de peut-être… Mais il y a des moments magiques, comme Givenchy l’automne dernier. Le designer de Givenchy parfum m’a rencontré en 2005. Cet automne, j’ai été à Paris, j’ai été bien traité. Il n’y avait pas de divas, tout le monde était traité sur un pied d’égalité. Un moment merveilleux. »

L’ère PUNK

Après Sainte-Rose, son père a eu un meilleur emploi et la famille a déménagé à Laval-des-Rapides. La violence a suivi. Mais c’était aussi le début des années glorieuses, nous sommes rendus vers 1975, avec les Sex Pistols, les visites chez le disquaire L’Alternative, face au Théâtre Saint-Denis. « C’était une époque éclatante pour Montréal avec les Kraftwerk, les Talking Heads, les Sex Pistols, les night-clubs  qui ouvraient, le Limelight, le Buds, le Jardin. Les gens étaient beaux, intéressants. C’était ma découverte du monde gay, mes premiers chums, mes premières baises. Et le retour à Laval dans des états alternatifs. À cette époque, je m’étais acheté des synthétiseurs analogues et je créais de la musique. » Comme il le souligne, il n’a aucune formation musicale mais une belle oreille pour détecter si ça sonne bien.

Au début des années 1980, il créait des atmosphères musicales, des concepts visuels. « Je suis entré dans des galeries alternatives et expérimentales comme Véhicul’Art, j’ai rencontré Monty Cantsin dans ses débuts hippies. J’avais une coupe de cheveux qui effrayaient les gens de Laval à l’époque. J’ai fait des vidéos…» Quand sa mère s’absentait pour aller au bingo, il réunissait des amis dans son garage, Jean-Luc Bonspiel, Tristan Renaud et compagnie. Le garage était aménagé en atelier avec synthétiseurs, batterie de cuisine et ils créaient de la musique hallucinante. Son nom punk de l’époque était Lazer Dog.

« Nous avons faits des performances, des installations dans des endroits comme Véhicul’Art, appelés Projets urbains. On en a vu des vertes et des pas mûres. Il y avait une effervescence que je ne retrouve pas beaucoup en 2014. » C’était aussi des années formatrices en arts visuels. Il achetait des livres de Van Gogh, de Picasso et apprenait la peinture uniquement en regardant le visuel. « Je suis capable de faire de l’hyperréalisme, de l’abstrait. Mon langage, je me le suis construit en regardant les images des autres. Mon style, je l’ai découvert par accident en me brisant la main droite en faisant une performance avec Cantsin. J’ai commencé à dessiner avec la main gauche et ce fut comme une révélation, un coup de foudre. » C’est le début du style Zïlon. C’est l’époque où l’on commence à voir ses graffitis dans des endroits comme l’ancien K.O.X. « Je vivais en mangeant du Kraft Dinner en cohabitant avec 4 ou 5 personnes souvent alcooliques ou droguées.»

Le Clochard céleste, rebaptisé plus tard les Foufounes électriques, le Tarot quant à lui renommé le Garage furent des lieux de découvertes, autant sexuelles qu’artistiques. C’étaient aussi ses premières galeries improvisées, en particulier les Foufounes, qui n’occupait que le deuxième à l’époque, et qui fut le haut-lieu de la peinture en direct. Des groupes se créaient spontanément, tel Sensitive Organ. Ils ramassaient des poubelles à l’extérieur, lui venait avec son synthétiseur, qu’il possède encore. Et il y avait le Vieux.

« Le Vieux Montréal de Montréal faisait penser à Berlin. C’était sale, il y avait des spectacles improvisés dans des lofts. Les gens lançaient leur bouteille aux musiciens en signe d’appréciation (!) au lieu d’applaudir. Aujourd’hui, on est rendu tellement Politically Correct. Tout est aseptisé. »

« On s’appropriait d’espaces abandonnés. Par exemple un tunnel qui passait sous l’avenue du Parc. On distribuait des tracts photocopiés sur une Xérox qu’on laissait chez des disquaires alternatifs. On peignait le tunnel vers 1h du matin,  Les gens arrivaient vers 2h, givrés, avec leur alcool. On dévissait une plaque pour brancher un boom box et les gens peignaient par-dessus ce qu’on avait fait au son de la musique punk. Aujourd’hui on ne peut pas toucher aux œuvres. Ce sont des zoos où l’on est empaillé. »

[Pour lire la suite et fin.]

[Photos fournies par l’artiste.]

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Les 9 vies de Jean-Luc Bonspiel [3] https://bazoom.ca/culture/les-9-vies-de-jean-luc-bonspiel-3 https://bazoom.ca/culture/les-9-vies-de-jean-luc-bonspiel-3#comments Fri, 15 Nov 2013 13:47:41 +0000 https://bazoom.ca/?p=7596 Les 9 vies de Jean-Luc Bonspiel [3]
J’ai dû m’exiler du Québec pour travailler. J’avais fait bobo à un cabinet de relations publiques.]]>
Les 9 vies de Jean-Luc Bonspiel [3]

[Troisième partie de trois. Pour lire la première partie. La seconde.]

Le syndicat de la rétro-information

« J’ai dû m’exiler du Québec pour travailler. J’avais fait bobo à un cabinet de relations publiques. Je pensais qu’une centrale syndicale, c’était du bon monde. J’ai parti le syndicat pour faire chier le cabinet. Le soir de la fermeture des signatures, il nous manquait une. On a cherché une fille de St-Lambert qui avait travaillé un jour, le jour de réfé-rence, ce qui était suffisant pour que sa signature soit valide. Vers 10h le soir, on l’a enfin trouvée sur un terrain de basket. On lui a expliqué la situation et elle a signé… C’était une shop de terreur. Par la suite, je me suis fait trainer dans la marde par un juriste des plus éloquents d’une grande boîte. »

Montréal-Toronto

Depuis neuf ans, Jean-Luc Bonspiel vit à Toronto, principalement comme traducteur à la pige. « À chaque fois que je reviens à Montréal, on dirait que la ville est de plus en plus petite. À Toronto, tu peux parcourir tout le centre-ville sans perdre ton signal de Starbuck. Et il y a de la richesse. Des Alpha Roméo, des Ferrari tu en vois partout. Un penthouse avec une seule chambre peut se vendre jusqu’à 26 millions. Mais 40 % de l’immobilier, c’est de la spéculation de la mafia russe. Ici à Montréal soyez content d’avoir votre petite mafia italienne, ce n’est rien par rapport à la mafia russe. »

« -As-tu lu mes chroniques de l’Express de Toronto ?

-Oui je me disais qu’ils ne te garderaient pas longtemps. Ils sont tellement à droite, ai-je répondu en riant.

-C’est juste parce qu’ils ne comprenaient pas la moitié des choses que j’écrivais.On me regardait un peu comme un chien avec qui tu fais un tour de magie. Ah ! J’ai eu de la misère à m’intégrer à la Francophonie de Toronto. J’étais allé à ce qui était autrefois l’Association canadienne-française de l’Ontario qui est maintenant l’Association des Communautés francophones de l’Ontario. Puis je me suis rendu compte…  J’ai fait de la radio à CHOQ. Après 10 ans de tergification, de brettage et de tétage, la communauté francophone s’était finalement gréée d’une radio. Je ne me suis jamais intégré dans la communauté francophone après neuf ans. J’ai bien mes clients, mon réseau… Ce sont des gens qui ont des préoccupations pointues, qui tourne autour du cash. Je parle à bien des gens qui ne voient pas Toronto comme froide, inaccessible. Mais je me suis rendu compte qu’ils appartiennent à différentes communautés culturelles autre que francophone. Sans doute parce les francophones se considèrent comme chez eux. Ils n’ont pas de radeau de survie comme pour les autres communautés. C’est comme le grand océan de vidanges, on ne peut mettre le pied dessus. Il y a 35 000 personnes qui vivent en français à Toronto. C’est dix fois moins que le nombre de personnes qui vivent en tamoul. Il y a plus d’Éthiopiens. Tout le monde est minoritaire. Il faut aller dans les lointaines banlieues pour trouver une minorité majoritaire. Quand tu penses que le plus grand mail asiatique au monde est en banlieue de Toronto. Les vidéos y sont piratées plus vite qu’à Hong Kong. »

La radio

« J’ai juste gardé la radio comme passion. Personne te check. La liberté. J’en ai fait plus que je pensais faire. C’est pas fini mais où aller ? Mon émission de radio à CIBL est le dimanche soir à 23h parce que je suis en punition depuis des années. Parce que j’ai osé des choses que je n’aurais pas dû. La radio communautaire a reçu 1,4 millions de dollars. Plutôt que payer ceux qui font la radio, on donne l’argent à la mafia pour qu’on construise une horreur au coin de Saint-Laurent Sainte-Catherine. Aujourd’hui on a des débats pour faire plaisir au Barreau du Québec ou à la Chambre de commerce de Montréal.  »

«Nombre de mes interventions sur la scène sociale ont été marqués par un intense travail rémunéré pour des peanuts. C’est comme pour ton magazine. Quand on n’a pas l’argent, il faut mettre du temps, beaucoup de temps. Mais vous n’êtes pas encombrés par le papier. Tu vois, Alan Lord un jour m’a fait écouter une de ses compositions Bon yeu donne-moi une job. Je l’ai testé et j’ai dit non. Alan l’a ensuite fait écouter au téléphone à Dédé [Fortin, leader des Colocs]. J’avais composé la mélodie vocale, si tu veux, mais je n’ai rien eu. Mais c’est pas grave. Mon vœu de pauvreté est intact. Sinon la société t’enlève ton allant. » Un autre rendez-vous l’attendait. Jean-Luc Bonspiel est ensuite parti comme il est arrivé. Comme un coup de vent. Non sans au préalable me suggérer de devenir l’antenne de Bazoom à Toronto. L’affaire est à suivre.

[Vent du Mont Schärr sur BandCamp.

La maison des truites sur Facebook.

Tous les cancers de l’Arc-en-ciel – Dimanche 23h sur CIBL 101,5 Montréal.

Jean-Luc Bonspiel sur Soundcloud.

Jean-Luc Bonspiel sur Facebook]

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Les 9 vies de Jean-Luc Bonspiel [2] https://bazoom.ca/culture/les-9-vies-de-jean-luc-bonspiel-2 https://bazoom.ca/culture/les-9-vies-de-jean-luc-bonspiel-2#comments Thu, 14 Nov 2013 13:47:53 +0000 https://bazoom.ca/?p=7594 Les 9 vies de Jean-Luc Bonspiel [2]
Vent du Mont Shärr était sur une bonne lancée. Mais quand tu vois la mer Rouge se séparer, c’est pas bon signe. ]]>
Les 9 vies de Jean-Luc Bonspiel [2]

[Deuxième partie de trois. Pour lire la première partie.]

Vent du Mont Schärr

En fin de compte, nous n’avons pas beaucoup parlé de VDMS. Ce groupe semi-légendaire a vécu de janvier 1986 à juin 1990. Il fut le premier groupe québécois à signer sur un label français alternatif, Boucherie Pro-duction, avant même de signer au Québec.

« Vent du Mont Shärr était sur une bonne lancée. Mais quand tu vois la mer Rouge se séparer, c’est pas bon signe. Pour avoir un succès commercial, c’est l’imprésario qui fait la job. On n’en avait pas, faut dire que quand tu les traites comme du poisson pourri. Rock Envol 1986 c’était un set-up pour couronner le début de carrière solo d’un certain chanteur. C’était organisé par Radio-Can, donc c’était tout croche. Mais Gérard Lambert avait monté un jury avec des gens qu’on ne peut pas acheter comme Luc Plamondon. C’était une bonne affaire pour le Club Soda. De gros commanditaires, personne à payer… Le chanteur a été devancé par des groupes qui venaient de nulle part [VDMS a remporté le concours]. Ça nous a permis d’aller en Europe une couple de fois. On est aussi le seul band qui a signé en France avant de signer au Québec. Quand tu es en avance sur ton temps…»

« Quand j’ai ressorti les vieux tapes en 2004, on a fait une tournée de promotion dans les radios dont CIBL. Tout à coup un kid rentre et écoute la conversation. Il nous dit que VDMS c’est une légende, ils n’ont jamais existé. C’est parfois bien d’être une légende même si ton chèque de droits d’auteur n’est que de 2,14$ tous les trois mois. Il y a eu des répercussions… Mais ça beurre pas les toasts. Tant mieux dans un sens, car si j’étais rentré dans ce tordeur, je serais mort. Comme une de mes idoles Gilbert Chénier, un génie des années 1960. Il a écrit les textes et les chansons de Capitaine Bonhomme, la Cabane à Midas, Patof, l’Oncle Pierre. Il est mort à 39 ans, bien usé. »

« Les Foufs vont nous booker pour la première fois depuis 1990. Mais j’ai recyclé le band avec des jeunes (dans la trentaine). En fin de compte, on a eu la chance de travailler avec des gens intéressants. »

La course à la mairie de Montréal

« En 1994, j’ai fait la campagne à la mairie contre Jérôme Choquette et Pierre Bourque. Aujourd’hui on a des zombis corporatifs, à la langue de bois, des hommes et des femmes de pailles. Il n’y a plus de fuckés. C’est quand tu fais une campagne politique que tu te rends compte que tu connais personne. Là tu as besoin d’un réseau. Je me suis présenté en 1992 dans Saint-Jacques et en 1994 à la mairie. L’excellent nom de parti qu’on avait trouvé c’est votez ici. Il y a toujours 10 à 20 % de votes stupides. Aujourd’hui, on ne mise que sur ces votes. On voulait présenter 20 candidats pour pouvoir dire que nous sommes déjà vingt culs. Ça m’a permis de passer à Pascau. CKVL. J’ai terminé sixième ou septième sur 12, comme cette année [l’entrevue a eu lieu quelques jours avant les élections municipales] avec 974 votes. Avec une dépense de zéro cent. Douze, ça a rapport avec les apôtres ? Quelle brochette d’opportunistes ! Il faut dire que la moitié des gens sont illettrés… Quand tu grattes un peu, le niveau trois de littératie… Lire et comprendre un texte de 300 mots dans notre société relève de l’exploit. Remarque que c’est comme ça partout, au Canada, en Australie… C’est assez décourageant.»

Restaurateur végétalien

« Par l’entremise néoisme j’ai découvert le végétarisme Krishna. Après un stage à  Toronto, j’ai ouvert le premier restaurant végétalien de Montréal avec Marie-Pierre Michaud en 1997 sur St-Laurent. Il existe encore. Je me rappelle qu’il fallait que j’explique tout. Non il n’y a pas d’œufs, juste du bran de scie. Je ne suis plus végé aujourd’hui. Quand ça devient un dogme… En ai-je entendu des théories crackpot ! Ils veulent ton bien, puis ils le veulent en ostie. J’ai entendu des histoires genre : j’ai été frugivore pendant deux ans jusqu’à temps que mes ongles noircissent et tombent. Encore une fois ça manque d’art. J’ai fait des stages d’observation pour le Commensal. Ah ! l’odeur de sarrazin. Je comprends pourquoi la majorité des cuisiniers deviennent alcooliques ou drogués. Ce n’était pas pour moi. »

[Suite et fin.]

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

[Photo : Pretty Vacant (Jack V), Jean-Martin Mignault, Jean-Luc Bonspiel, et Alan Lord. Nous ignorons de quel journal c’est tiré. Si quelqu’un le sait, prière de nous en informer pour les crédits.]

[Articles sur Vent du Mont Scährr :

L’histoire du rock racontée aux enfants – Vent du Mont Scährr (2006)

Le Vent Du Mont Schärr n’a pas soufflé son dernier mot! (2008)

Vent du Mont Schärr sur BandCamp.

La maison des truites sur Facebook.

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Jean-Luc Bonspiel sur Soundcloud.

Jean-Luc Bonspiel sur Facebook]

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Les 9 vies de Jean-Luc Bonspiel https://bazoom.ca/culture/les-9-vies-de-jean-luc-bonspiel https://bazoom.ca/culture/les-9-vies-de-jean-luc-bonspiel#comments Wed, 13 Nov 2013 13:47:18 +0000 https://bazoom.ca/?p=7589 Les 9 vies de Jean-Luc Bonspiel
Jean-Luc arrive à nos bureaux à 10h tapant, comme prévu. La veille, il avait donné un spectacle avec La Maison des Truites.]]>
Les 9 vies de Jean-Luc Bonspiel

[Première partie de trois]

Jean-Luc arrive à nos bureaux à 10h tapant, comme prévu. La veille, il avait donné un spectacle avec son nouveau groupe, La Maison des Truites, un jeu de mots comme il les affectionne. Nous, c’était plutôt l’air de Sophie Stickée, de Vent du Mont Schärr, son légendaire groupe alternatif des années 1980, que nous avions en tête en le voyant arriver. Depuis la polyvalente, nos chemins ont suivi une trajectoire parallèle. Nous avons eu bien des amis en commun mais nos chemins ne s’étaient plus croisés. Une entrevue à bâtons rompus, du coq à l’âne, allait s’en suivre.

« On reprend une conversation interrompue en 1977 à Saint-Léonard dans le café étudiant  », lance-t-il en guise d’introduction. Son esprit de provocation ne date pas d’hier. Je me souviens de mon jeune frère me téléphonant, paniqué : « Des jeunes jettent des pierres sur Jean-Luc Bonspiel ! » Il était en train de se faire photographier en costume nazi à l’entrée de la polyvalente…

Je suppose que les jeunes d’aujourd’hui auraient du mal à se figurer ce qu’était le café étudiant de la polyvalente St-Ex dans cette morne banlieue du nord de l’Île de Montréal qu’était Saint-Léonard à cette époque. On roulait du tabac Drum, on fumait des Gitanes, des Gauloises et d’autres substances moins licites dans une atmosphère complètement enfumée, dans la quasi obscurité, éclairée uniquement par des spots de couleur et où jouaient en boucle les quatre ou cinq disques, de Led Zeppelin, Genesis, Supertramp, que contenaient la discothèque. Jean-Luc et moi, nous nous retrouvions régulièrement, question de jouer aux échecs, discuter et manquer nos cours dans cette atmosphère assourdissante.

« Ce café était l’initiative du principal– je le sais car il sortait avec ma mère – qui voulait  retenir les adolescents et les empêcher de traîner dans les rues car il y avait un noyau de messieurs qui n’avaient pas nécessairement les meilleures idées…» se remémore Jean-Luc.

« À Saint-Léonard, il y avait du bon monde. Mais ce n’était pas cosmopolite. Il n’y avait pas d’art. C’était médiocre. Une seule galerie de fleurs en pot, de clowns tristes. Avec du recul, avec notre regard d’adulte, on se rend compte qu’il y avait des épaves, à peine fonctionnelles, des weirdos parmi nos profs. Des jeunes aussi qui ne savaient pas comment s’y prendre. Je n’ai jamais voulu être prof. Si tu as le moindrement le cœur à la job, ça mine le moral ben raide. »

« Le départ de Saint-Léonard, tu as regretté ? Moi je n’ai jamais regardé en arrière. Maintenant ça commence à ressembler aux abords de la ville. Quand par mégarde j’y retourne, je pense au boulevard des Laurentides. Tout est laissé à l’abandon depuis des années. Heureusement dans les années 1960, les habitations étaient mieux construites. Aujourd’hui avec tous ces condos qu’on construit… De haute qualité ? Puis la bulle, la fameuse bulle qui va éclater… »

Jean-Luc Bonspiel est né à Montréal, à l’hôpital Jean-Talon pour être précis. Il a du sang Mohawk par son père qui vient d’Akwesasne. « Tu peux t’imaginer la bizarre de famille. » Son grand-père était un pur autochtone. Il avait marié une blanche, ce qui n’était pas courant à l’époque. « Peut-être des histoires de trafic, qui sait ? » Au primaire, il a sauté sa quatrième année parce que, croit-il, la maîtresse ne voulait pas l’avoir. « Je devais être trop perturbant, je suppose. » Après Saint-Léonard, ce fut le Collège Maisonneuve. « Là ce fut bien. »

Le Collège Maisonneuve et le milieu underground

Quitter Saint-Léonard, lui a permis de découvrir un autre univers. Venu jouer dans le spectacle de la Passion, il se souvient encore du curé de Sainte-Angèle de Mérici qui l’obstinait que Ponce Pilate était Juif et Hérode, Romain. « Il me disait qu’il savait de quoi il parlait car c’était lui le curé. C’est la dernière fois que j’ai mis les pieds dans une église. »

Ce sont plus les gens qu’il a rencontrés que les études comme telles qui l’ont formé. «Parfois j’ai dû travailler pour payer mon inutile bac en linguistique de l’UQÀM. La direction nous disait qu’on allait fermer le département. Mais inquiétez-vous pas, vous aurez le temps de finir. On n’a plus de ressources et vous allez avoir la scrap… Nous ça nous fait peur Chomsky… Tout ça pour créer un département de science de la langue. Essentiellement pour apprendre comment faire un c.v. », ironise-t-il.

« Maisonneuve ce fut merveilleux. J’ai rencontré Zïlon, puis Cantsin. C’est Tristan Renaud qui me l’a présenté. On fumait du hash en écoutant Klaus Nomi dans un sous-sol de bungalow à Laval. J’écoute en ce moment ce qu’on a enregistré au début des années 1980. C’est bon car on n’avait pas d’inhibitions. Je me souviens que sa mère aimait beaucoup les œuvres qu’il peignait quand il était plus jeune. Son premier tableau était exposé dans la cuisine, un marin à la pipe. Zïlon était déçu, car il venait de s’inscrire à un cours d’art par correspondance et ça ne correspondait pas à ses attentes. Déjà, on était très impressionné par son coup de pinceau. »

Et il y avait la littérature. « Je ne me souviens plus comment j’ai rencontré Gaétan Soucy. J’imagine que qui se ressemblent, s’assemblent. Je le tétais souvent afin qu’il écrive dans nos différents magazines éphémères comme Ecce Ovo. Nous ne sortions généralement qu’un numéro, des photocopies brochées. »

C’était l’époque Néoiste. Monty Cantsin, Istvan Kantor de son vrai nom, Hongrois né en 1949 et émigré au Canada, en est la figure emblématique.

« En peinture, j’ai été commissaire-priseur aux Trois par quatre, second de François Gourd. Des artistes relançaient leurs propres toiles. Armand, je t’aime bien mais tu me fais chier. Je veux m’en aller me coucher. Il y a bien du narcissisme dans ce milieu-là, il faut que tu fasses avec. Je suis certain que je suis aussi coupable que les autres. Ostie que j’ai détesté ça. »

« On réalisait des performances, à l’époque il y avait un réseau de galeries, dont celle d’Arthur Pinchaud. Mon groupe préféré a été Électrolux avec Alan Lord, Zïlon et Jean-Martin Migneault. On jouait  de la musique électronique incompréhensible devant cinq ou six personnes. Ça tenait du vaudeville et de la croisade. »

« Puis il y a eu les deux festivals de poésie où j’ai rencontré William S. Burroughs et toute la gang de poètes de New York. Si tu compares avec les soirées d’aujourd’hui au Gainsbar, à L’Escalier ou au Bistro de Paris… »

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[Photo : Les Néoistes vers 1979 - Yana, Kiki Bonbon (Monty Cantsin), Jean-Luc Bonspiel et Lion Lazer (Zïlon).]

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